La santé des femmes est différente de celles des hommes pour des causes biologiques liées au sexe mais aussi par des comportements de genre qui impactent à des degrés divers notre santé (1). Ainsi sur le plan sanitaire, des événements médicaux sont très spécifiques à la femme : la grossesse, la vie génitale, la contraception, la ménopause, l'allaitement, l'accouchement. D'autres sont directement influencés par le comportement et l'environnement comme le tabagisme, l'alcool, le travail, la vie familiale, le stress et les violences physiques et psychiques, l’isolement, l’insécurité financière. En France la première cause de mortalité en population générale est le décès par cancer (29 %), mais chez les femmes, la première cause est la maladie cardiovasculaire (2). Les infarctus et les AVC sont sous diagnostiqués et moins bien pris en charge (3). Les femmes sont de plus en plus concernées par des pathologies chroniques classiquement étiquetées comme masculines. C’est vrai pour les maladies cardiovasculaires mais aussi par exemple pour les maladies respiratoires chroniques et le cancer du poumon qui ne cesse d'augmenter chez les femmes (+2,8 % par an actuellement). Ceci est à mettre en parallèle avec la mortalité liée au tabac qui augmente chez femme de plus de 5 % par an alors qu'elle diminue chez les hommes. Le tabac est d’ailleurs beaucoup plus dangereux chez la femme à nombre de cigarettes équivalents. De même la maladie athéromateuse est plus évoluée chez les femmes diabétiques au même stade de la maladie. Alors que le diabète double le risque de maladie coronarienne chez les hommes, il le triple chez la femme (4). On a par ailleurs du mal à prendre en compte dans le calcul du risque cardiovasculaire féminin les évènements spécifiques tels que l’hypertension gravidique, la prééclampsie, le diabète gestationnel, les modifications métaboliques de la ménopause qui sont d'authentiques facteurs de risque cardiovasculaire (5). D'autre pathologies, comme les infections sexuellement transmissibles sont moins dépistées et traitées chez les femmes, d'autant plus à risque qu’elles sont en situation de précarité.
La précarité aggrave plus particulièrement l’insécurité sanitaire chez les femmes. Et certains chiffres parlent d’eux même (HCE. 2017)(6) : les chefs de familles mono -parentales sont dans 84 % des femmes et 1/3 de ces familles sont sous le seuil de pauvreté ; plus de la moitié de ces ces femmes renoncent au soin. Les femmes sollicitent moins les aides sociales. Elles consacrent davantage de temps aux enfants, au conjoint, aux aînés …. La précarité rend l'accès aux dépistages (cancer du col, du sein ou du côlon) encore plus difficile (31 % des femmes de faibles revenus n’ont pas de frottis).
La mortalité prématurée liée aux maladies cardiovasculaires est trois fois supérieure chez les ouvrières (7). Mais la situation la plus marquante est celle des femmes migrantes dont la situation socio-économique et sanitaire est dramatique. Elles migrent autant que les hommes mais trouvent moins de travail et sont souvent en grande précarité et exposées à de nombreuses formes de violences (administratives, physiques ou psychologiques) et cependant rarement pris en charge sur le plan médico-psycho-social (7).
Depuis plus d’un an, la pandémie COVID 19 est un véritable révélateur des inégalités hommes/femmes., Les femmes ont été très présentes sur le terrain, mais moins dans les réunions de crise et sur les chaines d'informations ; l 'impact socio-économique et personnel a été dramatique pour elles en particulier, avec explosion des violences conjugales, aggravations des difficultés économiques et des pathologies mentales.
Au total, il y a un déséquilibre de la prise en charge des femmes par méconnaissance ou minimisation des particularités, physiopathologiques, cliniques et thérapeutiques liées au sexe.
Agissons donc, toutes et tous ensemble pour les femmes, comme le fait, le fond de dotation « Agir pour le Cœur des femmes », dont je suis fière d 'être ambassadrice avec des actions concrètes, comme «Les Bus du Cœur destinées au dépistage cardiovasculaire et gynécologique, qui iront dès septembre 2021, à la rencontre des femmes vulnérables ; soutenons-les !
Références :
1. Rapport HAS sexe, genre et santé - Rapport d'analyse prospective 2020.
2. Boulat, Ghosn W, Morgand C, et al. Main trends in cause-specific mortality in mainland France between 2000 and 2016. BEH. 2019 ; 29-30; 576.
3. Mehta LS, Beckie TM, DeVon HA, et al. Acute Myocardial Infarction in Women: A Scientific Statement From the American Heart Association. Circulation. 2016 ; 133(9):916-47.
4. Appelman Y, Van Rijn B, Ten Haaf M et al. Sex differences in cardiovascular risk factors and disease prevention. Atherosclerosis. 2015; 241: 211-218.
5. Mounier-Vehier C, Nasserdine P, Madika A-L. Stratification du risque cardiovasculaire de la femme : optimiser les prises en charge. Presse Med. 2019; 48: 1249–1256
6. L’HCE (Haut Conseil à l’Egalité de 2017).
7. Andro A, Scodellaro C, Eberhard M, et al. Migration path, reported violence and self-perceived health status among migrant women accommodated in emergency hotels in ile de France. DSAFHIR studie. BEH 2019; n°17-18; 334 -41.
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